Jeunesse de Burgred
La naissance de Burgred se voulait sous les meilleures auspices, d’un père Humain et d’une mère Elfe inséparables, imaginant leur amour éternel, sous les bénédictions d’Einhasad et d’Eva. Ils élevèrent leur enfant dans un amour et une protection grandissante, installés dans une maison de campagne sur les terres elfiques, à mi-chemin entre la cité elfique et la frontière avec Gludio.
Les années s’écoulèrent paisiblement, le père s’occupant de travailler à Gludio pour pouvoir nourrir la petite famille, la mère s’occupant à plein temps du petit. Mais au fil des années, le père s’est confronté à un problème qu’il ne s’était pas réellement questionné jusque là: sa femme est une elfe, et son fils a une croissance forcément plus lente qu’un humain “entier”. Sa femme tenta bien sur de le rassurer du mieux possible, mais cela semblait le rendre petit à petit plus irrascible, que ça soit envers eux ou même envers n’importe qui.
Il était donc déterminé à léguer coûte que coûte un héritage de son vivant, montrer qu’il a éduqué son fils, et qu’il l’a fait parfaitement. Il a commencé à être plus strict à ce moment-là, et lui faisant divers cours en plus de l’école. Le père étant militaire, il se mit en tête aussi de lui apprendre par lui-même le maniement des armes quand Burgred fut plus grand et en âge de suivre cet apprentissage, en commençant bien sûr par des armes en bois. A un de ses anniversaires, il offrit même une épée longue qui lui servira quand il maniera mieux cette arme, d’assez bonne facture.
Il ne ménagea pas ses efforts, et plus les entraînements passèrent, plus le père fut rude avec son fils, la mère commençant à mettre des limites, agaçant de plus en plus le père en lui répondant qu’elle n’avait pas à se mêler des entraînements et qu’elle devait rester aux tâches ménagères, image inhabituelle de cet homme normalement doux, protecteur et aimant. La réaction ne tardait pas à se faire, une bonne mandale ponctuant l’échange, la “boniche” disparaissant quelques jours le temps que le couple se calme, emmenant au passage Burgred pour qu’il puisse se reposer de cette ambiance de plus en plus malsaine qui régnait. La mère continuait d’entourer le petit ange de tout son amour, se voulant la plus protectrice possible, même de son mari, la tendresse incarnée. Burgred aimait de plus en plus sa mère alors qu’il commençait à se méfier de son propre père, et de moins en moins d’accord avec son comportement.
Les tensions se calmèrent dans le couple après quelques semaines, mais d’autres tensions apparurent: celles sur le continent avec la chute d’Aden et d’Oren suite à l’apparition de la 3e plaie en l’an 1121. Le père semblait craindre de devoir partir en campagne de longs moments et donc ne plus voir son fils, commençant à ne plus être tout jeune, tandis que son fils était devenu un grand gaillard costaud, fier de l’avoir façonné par les armes. Burgred tentait de jouer le fils parfait, lui montrant son amour pour son père pour tenter de le rassurer, mais le père ne semblait pas être aussi réceptif qu’il l’espérait, sûrement une trop grande attente de sa part. Plus le père vieillissait, plus il devenait aigri, et les tensions continuaient entre lui et les deux, pourtant mettant de la bonne volonté pour que les choses s’améliorent, usant de patience encore et encore. Le militaire semblait même devenir de plus en plus agressif, à la fois dans son métier et dans sa famille, ce qui commençait à frustrer Burgred de le voir jamais satisfait, et avec la peur de le voir s’éloigner de lui.
Après une nouvelle dispute encore plus virulente entre ses parents, le père revint bourré d’une petite ballade à Gludio, la mère morte d’inquiétude vu l’heure de retour, et Burgred qui était en armure en cuir et avec son épée pas loin qui était parti chasser récemment pour aider sa mère. Papa les regardait tour à tour, en leur demandant en riant ce qu’ils avaient et pourquoi ils le fixaient ainsi, puis demanda à sa femme si le diner était prêt, d’une façon autoritaire. Sa femme lui répondit que ça faisait longtemps qu’ils avaient mangé, qu’il n’avait pas à revenir à une heure aussi tardive, et qu’il savait où se trouvait la cuisine, qu’en plus son fils avait ramené de la viande.
Le père se mit en colère subitement, allant baffer sa femme en l’empoignant par le bras en lui disant qu’il en avait marre qu’elle ne fasse plus ce qu’il veut, qu’elle soit insolente et qu’elle donne un exemple trop mou à leur fils. Il se mit à mettre la main au cou de sa femme en serrant et lui disant, l’haleine bien alcoolisé, qu’elle avait intérêt à lui faire ce foutu repas sinon cela se passera mal.
Burgred eut un sursaut en voyant la scène, déjà excédé en temps normal par son vieux père qui perdit de plus en plus pied avec les années, et voyant sa mère en danger, il prit son épée et la planta sans hésiter dans le dos de son père sous les yeux stupéfaits de sa mère.
“Comment … peux-tu.. fils indigne…”, marmonna le père, gisant au sol, Burgred tétanisé par ce qu’il venait de faire, se rendant compte qu’après de son geste. La mère semblait avoir repris ses esprits plus rapidement et dit à son fils qu’elle l’aimait peu importe son geste, et qu’il devait fuire, qu’elle s’occuperait de le couvrir s’il le faut, l’enlaçant une dernière fois en pleurs, Burgred sanglotant et chuchotant qu’il l’aimait et qu’il était désolé, sa mère répondant en chuchotant à son tour qu’elle ne lui en voulait pas et qu’elle craignait déjà que ce moment arriva…
Burgred prit donc quelques affaires, récupéra l’arme en laissant son père agoniser au sol sans même un regard, totalement troublé et tentant d’avoir les idées claires le plus possible. Il prit sa besace, et regarda une dernière fois sa mère qui lui fit un sourire tendre, se demandant s’ils allaient se revoir un jour ou non, avant de courir des heures sous la pluie, dépassant la frontière entre Gludio et la cité elfique. Il se réfugia dans une petite grotte où il utilisa une simple couverture, totalement trempé et tremblotant, seul dans le noir.
Le lendemain, il prit le temps de creuser un trou et d’y déposer l’épée en question, le cadeau du père qu’il a souillé par son acte et qu’il ne se pardonnera jamais malgré le contexte. Il ne sait pas s’il se pardonnera cet acte un jour, et s’il se sent prêt à vivre parmi les citadins, ayant toujours vécu sous la protection de ses parents. Il ne connaissait personne et ne savait plus quoi faire de sa vie, se disant une âme perdue, commençant à devenir plus froid et distant.
Il usa de ses talents de chasseur pour récupérer de la viande, et diverses choses pour se nourrir et se protéger, s’entourant un maximum de peaux de bête. Dès qu’il voyait une présence humaine dans les environs, il alla se cacher dans sa petite grotte, semblant ne vouloir voir personne.
Mais parfois, les rencontres se font malgré les précautions. Quelques temps de survie pour voir apparaître un gibier qu’il n’avait jamais vu auparavant: les araignées de la 6e plaie. N’étant plus du tout au fait de ce qu’il passait dans la vie du continent, il commença à se diriger vers le sud pour éviter ce genre de bestioles qu’il sentait trop dangereuses pour lui, à raison. Et il a pu le constater en tombant dans une embuscade de ses créatures. Il ne serait probablement plus de ce monde sans l’intervention d’un mage qui vint à son secours en éliminant par le feu ces horreurs, Burgred observant le spectacle de façon émerveillé, lui prenant ensuite le bras et le tirant avec lui pour le mettre en sûreté. Après quelques heures de marche silencieuse, le mage tentant quand même la discussion, mais Burgred encore fermé dans sa coquille, ils arrivèrent dans une demeure assez modeste, celle de ce fameux mage, se présentant, nommé Wodan. Burgred, hésitant, donna son prénom, pas du tout à l’aise. Wodan tenta d’avoir des informations sur ce que faisait Burgred seul dans la forêt, semblant encore tout jeune et bien solitaire. Le semi elfe lui répondit sèchement que ce n’était pas ses oignons, mais cependant qu’il était impressionné par ses techniques de combat, ne connaissant pour sa part que l’art des armes.
Le mage riait par son côté direct, et lui demanda tout aussi direct si cela l’intéressait et s’il était intéressé d’être logé ici en attendant d’avoir une autre option pour se loger, lui expliquant la situation des plaies rapidement et lui parlant des araignées qu’il vient de voir. Burgred commençait à palir encore plus qu’il ne l’est, pensant à sa mère dans la région concernée, mais tentant de se rassurer qu’elle est très intelligente et maline et qu’elle a dû se mettre à l’abri.
Pendant plusieurs mois, le mage et le guerrier cohabitaient plus ou moins, Wordan enseignant l’art de la magie du feu au jeune homme en échange de quelques informations sur sa vie, étant très curieux de nature. Bien entendu, il cachait totalement toute la partie de l’histoire où il planta son père sans sentiments, et restait évasif sur pourquoi il ne voulait plus combattre à l’épée pour le moment, d’où entre autre son intérêt à vouloir manier la magie plutôt que combattre au corps à corps. Il vit aussi en l’élément du feu la possibilité de mieux survivre dans la nature, la facilité accrue de faire des feux de camp, se nourrir et échapper plus facilement aux prédateurs comme les saloperies des plaies.
Malheureusement, les choses ont souvent une fin, et le mage a dû annoncer à Burgred qu’il devait repartir pour Gludin mais pour une très longue durée. Il proposa au semi-elfe de rester ici malgré cela, mais il refusa, lui disant qu’il devait suivre sa propre voie et continuer à vivre en marge de la société, le remerciant du fond du cœur pour tout ce qui lui a été offert, que ça soit les entraînements, l’arme magique, ou même juste pouvoir avoir confiance en quelqu’un, même si Burgred ne sait pas s’il méritait tout cela, sans s’étendre du pourquoi. Wodan lui dit que les portes de Gludio et Gludin seraient toujours ouvertes s’il en avait besoin, qu’il ne devait pas avoir peur des gens et faire plus confiance, et surtout se faire soi-même plus confiance. Au final, Burgred vit en lui une sorte de "père adoptif", comme s'il voulait se soulager de sa douleur d'une façon ou d'une autre.
Burgred retourna en solitaire dans la nature, longeant le territoire touché par les araignées, et se créant un petit camp dans une caverne dans les montagnes au Nord de Gludio, toujours portant sur ses épaules le poids de son acte ayant créé un traumatisme profond dont il ne pensa pas se remettre. Il continua la chasse, et après quelques temps, prit son courage à deux mains et fit un passage rapide à Gludio, avec sa dégaine de chasseur solitaire, ses longs cheveux peu entretenus, sa grosse barbe et son air renfrogné, tentant d’esquiver le plus possible les interactions avec les passants pour tenter de voir s’il pouvait vendre un peu du butin de ses chasses.